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Le vent qui courrait sur ses flancs lui donnait l’impression de voler et ce même alors que ses pattes frôlaient le sol à chaque pas avant de s’y abattre d’un coup, soudainement, pour redonner cette impulsion qui la faisait s’élever encore une fois avant de retomber, inlassablement. Elle courait seule à travers les bois comme si rien n’avait d’importance et aurait continué longtemps si une flèche n’avait pas brusquement sifflé à son oreille droite. Elle tourna la tête mais sans s’arrêter, vers le chasseur qui la poursuivait. Elle grogna si fort que le sol en trembla mais il n’en fut pas impressionné le moins du monde. Elle se remit alors à courir et tandis que le chasseur la poursuivait les arbres eux-mêmes semblèrent prendre vie autour d’eux. Ils s’animaient, leurs branches empêchant l’un et l’autre d’aller trop loin et, percher sur une branche, un homme encapuchonné murmurait des incantations à voix basse.

Il y a presque trois cent ans, une bête fut découverte dans le sud de l’actuelle France. Elle fut nommée la bête du Gévaudan. Les habitants de Gévaudan ne furent pas dupes. Il ne s’agissait pas d’un loup normal. Une célèbre famille de chasseurs français, les Argent, furent missionnés par le roi pour traquer et tuer la bête avant qu’elle ne massacre tout son peuple. Les Argent acceptèrent. Ils avaient comme étrange coutume familiale de tuer avec des armes en argents leurs adversaires les plus coriaces, les plus nobles. Dagues, flèches, épée tout était bon du moment que c’était en argent. Une flèche dans le cœur de la bête suffit à la faire succomber, là ou des milliers de flèches normales de la part des villageois n’avaient suffit. Deux ans plus tard Alberic Argent fonda l’Ordre des Chasseurs avec comme prélude au code cette simple phrase : « Nous chassons ceux qui nous chassent ».

« Ils saccagent nos terres ! Massacrent des innocents ! Et vous vous attendiez à ce que je ne fasse rien ? » Le jeune druide tapa du point sur la table d’audience, le sol trembla plus que de raison mais les Grands restèrent statiques. « Un chasseur était déjà à sa poursuite et nous ne chassons pas les chasseurs, Uriah. » Le jeune homme se mordit la lèvre. « Ils sont tout aussi capables de nous tuer que de les tuer, eux ! » s’exclama un autre. Il se leva et pointa son doigt sur le jeune druide. « Par ta faute, nous risquons de nous attirer les foudres de l’Ordre et nous avons assez à faire avec les Loups pour le moment. » Uriah, qui comprenait mieux sa faute, baissa la tête. Ses épaules retombèrent tandis que le poids de sa culpabilité les attirait doucement vers le sol. « Je suis désolé, je mérite votre courroux. » fit-il, soudainement plus calme. Un homme entra derrière lui, sans avoir été invité. Il portait une carabine et deux chargeurs à sa ceinture. « Puisque tu as fais perdre sa proie à Kylian, tu l’aideras à la chasser à nouveau. » prononça doucement le doyen des Grands. Uriah posa son regard sur le chasseur. « Pas de mauvaises surprise, gamin. » souffla celui-ci. Le regard du géant se posa sur les Grands, il les toisa un instant avant de reprendre. « Si l’un de vous se met dans mon chemin, nous n’hésiterons pas à rompre le Pacte. » Les Grands hochèrent la tête et Uriah et Kylian sortirent du bâtiment.

Leah tomba à genou sur le sol du Repère, une main sur son flanc ensanglanté. Son frère se précipita sur elle et la souleva doucement. « J’ai couru… pendant… des heures… Semer… Chasseur. » Le souffle court, la jeune femme ferma les yeux un instant. « Qu’on m’apporte de l’eau, vite ! » cria son frère, de cinq ans son ainé. Une jeune louve lui apporta une bouteille et Leah but à longues gorgées. « Ils sont de retours ? » Elle hocha la tête. « Ca faisait des mois qu’on ne les avait plus vu… » Leah reprenait doucement des couleurs, on lui apporta à manger et sa blessure au flanc commença enfin à guérir. « Un druide était là aussi. Je ne sais pas ce qu’il faisait, au début je pensais qu’il en avait contre moi. » Elle reprit doucement son souffle, encore un peu court. « Mais il a commencé à attaquer le chasseur aussi, ou alors il n’était pas assez expérimenté, je ne sais pas… » « Un druide ? » s’étonna son frère. « Leah tu connais l’histoire de Shella et Jack… » « Je sais ! Je la connais très bien et lui aussi surement, mais je te dis que sans ce druide je ne serais pas là. » Son regard bleu heurta celui, rouge, de son ainé.