La demeure Peyredragon était comme ton second chez toi, tant tu y passais du temps. Les souverains semblaient t'avoir adopté toi, le petit garçon si désireux de se montrer serviable envers la couronne. Et Endymion était devenu ton frère. Celui que tu avais toujours rêvé d'avoir et que tu ne retrouvais absolument pas en Gwayne. Vous vous étiez liés en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire et étiez devenus inséparables, tant et si bien que tu connaissais désormais chaque recoins du château. Pourtant, les différences ne manquaient pas entre vous. A tel point que personne n'aurait misé sur votre amitié. Tu étais froid, austère, mesquin et vil. Endymion, quant à lui, portait parfaitement son surnom de Prince Solaire. Tu avais mis du temps à t'adapter aux autres enfants de la famille, tant tu ne voyais que par ton amitié pour le jeune homme. Cette amitié intemporelle que vous conserviez toujours aujourd'hui et qui ne faisait que croître et se renforcer. La seule véritable amitié que tu possédais, d'ailleurs. Et puis, il y avait sa cadette Ashara. Ton béguin d'enfance, souvenir d'un temps révolu durant lequel tu écrivais des billets doux et te montrait timide. Tu préférais agir comme si cette période n'avait pas existé, la plupart du temps, puisqu'elle ne collait pas vraiment avec l'image que tu possédais désormais. Cependant, la jeune Peyredragon se faisait toujours un plaisir de t'embêter avec cette anecdote, à ton plus grand damne. Déjà à cette époque, Gwayne était à l'écart. Il ne prenait aucun plaisir à rendre visite aux souverains et ne faisait aucun effort pour s'intégrer au petit groupe que vous formiez, avec les enfants Peyredragon. Il ne partageait pas votre goût pour le jeu du meilleur esclave, ni votre amour pour la servitude dont faisait preuve les impurs. Et, autant dire que les choses n'avaient fait que se dégrader un peu plus, au fur et à mesure que les années passaient. Tu savais que, désormais, ton cadet détestait Endymion et ce qu'il représentait. Tu le savais même sympathisant des moldus et autres faibles du genre. Un comble. Et une honte pour toute la famille Blackfyre.

« Penses-tu que mon verre va se remplir de lui-même ? Crachas-tu à l'intention de cet idiot qui te servait d'esclave. » Tu dardas sur lui ton regard le plus noir et jubilas en le voyant se ratatiner sur lui-même. Tu aimais voir les autres se plier, aussi aisément que du papier, face à la peur que tu pouvais leur inspirer. Il n'y avait pas une seule âme, au sein de ce château, qui ne te craignait pas. Et, en particulier, pas au sein des impurs pour qui tu étais tout bonnement devenu une source de cauchemars incessante. C'était l'une de tes plus grandes fierté, d'ailleurs. « Je suis vraiment affublé du pire des esclaves. Idiot au possible et tellement incompétent que j'arriverais presque à en rire. » Comme toujours, Dixon resta muet comme une carpe. La meilleure réaction possible, dans une telle situation, il le savait aussi bien que toi. Il encaissait toujours tes remarques, tes moqueries et tes coups sans se plaindre. Car, s'il avait le malheur de prononcer un mot, il savait que sa situation se détériorerait encore un peu plus. Tu savais que, une fois le dos tourné, il te toisait avec un regard aussi noir que la nuit, en se demandant ce qu'il avait bien pu faire pour se retrouver soumis au bon vouloir d'un maître aussi cruel que toi. Nul doute qu'il aurait préféré se retrouver au service de ton idiot de frère qui éprouvait de la sympathie pour les impurs et les faibles en général. « Les verres de mes chers amis ne vont pas se remplir automatiquement non plus. » Czarina Romanova gloussa en tendant son verre à ce cher Dixon, avant d'ajouter, d'un ton glacial : « Mon bras commence à fatiguer, idiot, bouge toi donc un peu. » La brune était aussi impitoyable que toi et c'était probablement pour cette raison que vous vous entendiez si bien. Tu jetas alors un coup d'oeil à ces personnes autour de toi que tu estimais un tant soit peu et que, pour certains, tu considérais même comme des amis. La plupart des Peyredragon, ta deuxième famille. Les sœurs von Rozen, que tu tentais de raccommoder, tant bien que mal. Mihrimah de Lioncourt, également, ainsi que Faye Culwych. Autant de gens que tu devais garder soudé afin d'assurer la cohésion autour de ton Prince. Il le fallait, afin de le protéger contre ces gens qui menaçaient la couronne par un excès de pitié pour les impurs. Une belle brochette d'idiots. Une brochette avec des noms prestigieux, qui plus est. Ravenclaw, de Lioncourt, Tyrell, Romanova, Vasirilis ainsi que ton propre frère. Des noms que tu allais anéantir, les uns après les autres. Sans pitié ni remords.

S'il y avait bien une chose que tu appréciais autant que le pouvoir, c'était les femmes. La plus grande faiblesse de la gente masculine, sans aucun doute. Tu aimais les conquérir et, par-dessus tout, te jouer d'elles afin d'obtenir ce que tu voulais. Puis, sans remords, tu les jetais, telles de vulgaires poupées de tissu. Cette pauvre Vivian pouvait en témoigner. Malgré ta réputation désastreuse, ces créatures idiotes continuaient à se jeter dans tes bras. La preuve se trouvait cette fois au chapitre portant le nom de la douce Piper. Cela te faisait doucement rire, lorsqu'elles se revendiquaient fortes ou indépendantes alors qu'un seul de tes regards pouvait les mener tout droit dans ton lit. Des figures bien faciles à manipuler, ces filles. Cependant, cela ne t'empêchait pas pour autant de dépendre d'elles. Et de certaines en particulier. Dont l'une possédait une formidable cascade de boucles blondes et un visage d'ange que tu ne cessais de chercher dans la foule. Mais tu n'étais qu'un homme, extrêmement fier de surcroît et tu n'admettrais probablement jamais qu'une seule de ces jolies plantes puisse retenir ton attention plus d'une demie seconde. Non, tu te contentais de leur briser le cœur. Même à celles envers lesquelles ton cœur se montrait plus clément. Tu ne pouvais te permettre de montrer de la pitié ou de la bienveillance. Sinon, ta réputation d'être sans âme ni cœur s'envolerait en fumée. Et tu tenais énormément à cette crainte que tu pouvais lire au fond des yeux de ceux que tu croisais. Notamment parce qu'elle protégeait Endymion de certains désagréments. Tout Poudlard savait que tu étais l'homme de main du prince, son serviteur dont l'âme appartenait au diable. Tu avais le sang chaud et te battre parce que l'on avait osé chuchoter contre celui qui était également ton meilleur ami ne te dérangeait pas le moins du monde. C'était peut-être ce côté mauvais garçon qui attirait la gente féminine, d'ailleurs. Peut-être pensaient-elles se trouver en sécurité avec toi, que tu te battrais pour elles. Encore que, pour cela, il aurait fallût que tu leur accordes ne serait-ce qu'une once d'attention. Et ce n'était pas le cas. Ce n'était pas le cas parce que toute cette attention était déjà tournée vers une personne en particulier. Une créature délicieuse dont les cheveux aussi blonds que les blés faisait ressortir deux yeux totalement adorables, souriant et rieur la plupart du temps. Sauf lorsque la jeune Ryder venait à se retrouver en face de toi. Toi, l'ange vicelard à l'apparence aussi froide que les glaciers, tu n'avais droit qu'aux lèvres pincées et au regard dédaigneux. Elle ne t'appréciait guère. En réalité, elle te détestait probablement. Mais tu n'étais pas du genre à te décourager si facilement. Elle finirait par t'aimer, un jour. Tu l'y forcerais. Aysun ne t'échapperait pas et, si tu ne pouvais pas l'avoir, tu t'assurerais que ce soit le cas pour tout le monde. Un tantinet psychopathe, comme raisonnement, mais tu n'avais jamais prétendu être totalement sain d'esprit. Tu avais simplement appris à vivre avec cette parte d'ombre dévorante que tu possédais.