FAYE  & KIEREN
    Let it go, I am one with the wind and sky

 L'eau n'avait jamais été mon élément. Pourtant, je savais nager. Je me débrouillais même très bien. Mais j'avais toujours préféré prendre de la hauteur, grimper dans la cîme des arbres, voir le monde d'en haut. Peut-être parce que les rapaces avaient toujours été le symbole des Madden. Voler, grimper, se percher sur les hauteurs, c'était ce que nous faisions de mieux. Même moi, le bâtard de la famille. Mais je préférais éviter la tour d'astronomie quelques temps, et j'avais déjà escalader l'arbre le plus haut que j'avais pu trouver, et volé sur un balais aussi loin qu'il était permis de le faire. Pourtant, rien de tout ça n'était parvenu à vider mon esprit. Je ne voulais plus penser à lui, à notre passé, à son mariage avec ma soeur. A toutes ces choses que j'avais décidé de laisser derrière moi. Si seulement j'avais pu... Assis sur le bord du ponton, j'étais épuisé. J'avais besoin d'air, de renouveau. Mais j'étais coincé à Poudlard pendant encore trois ans. Il n'y avait aucun moyen de prendre de la distance. Où que j'aille, je ne pouvais m'éloigner de cette voie toute tracée par mon père. Et ça me rendait fou. Même ici, il continuait à tirer les ficelles. Je ne supportais plus cette omniprésence, alors qu'il avait toujours été si absent. Un paradoxe troublant qui ne le rendait que plus détestable encore. En admettant que ce soit possible.

Penser à mon père, à mon enfance, me ramenait à l'époque où, à chaque contrariété, je brisais une de ses règles pour me venger. Comme cette fois où j'avais réussi à me glisser parmi les invités d'une soirée mondaine où ma présence n'était, bien entendu, pas admise. Sans Devyn, j'aurais pu avoir de gros ennuis. Aujourd'hui, elle n'était pas là pour me couvrir, et c'était préférable. Bien que je sois incapable de lui en vouloir réellement, il m'était difficile d'oublier qu'elle allait épouser Zascha. A ce sujet, mes sentiments étaient confus. Tout ce que je pouvais dire c'est que cet arrangement ravivait la colère et la douleur que j'avais ressenti à son départ. Ce traître s'immisçait une nouvelle fois dans ma vie, de la pire façon qui soit. Et je ne pouvais rien faire contre ça. Après avoir perdu ce lien si précieux qui nous avait uni durant notre enfance, il venait s'interposer entre ma soeur et moi, comme s'il s'évertuait à me pourrir l'existence. Et à ce jeu-là, il était même plutôt doué. Tout comme mon père, qui n'avait cessé de tout orchestrer depuis le début, allant jusqu'à choisir Faye, mon amie d'enfance - une bâtarde tout comme moi - pour être ma fiancée. Pour être honnête, épouser ma propre soeur ne m'aurait pas semblé plus étrange... Après tout, nous avions grandi ensemble, à l'écart des enfants légitimes et nous pouvions aisément nous comprendre. Mais se marier... ça n'avait aucun sens ! J'avais besoin de lui parler, maintenant que cette fête irréelle célébrant nos fiançailles était derrière nous. Je n'avais pas eu l'occasion de me retrouver seul avec elle depuis ce jour-là, et j'avais besoin de savoir qu'elle était de mon côté, qu'elle se sentait aussi piégé que moi parce cet engagement ridicule. Et c'était pour cette raison que je lui avais demandé de venir.

A vrai dire, je n'étais même pas sûr qu'elle accepterait de me rejoindre. Elle pouvait tout aussi bien me détester, maintenant que je gâchais toutes ses chances de tomber sur un homme qui ne l'aimerait pas comme un soeur, mais comme une femme. Comme elle le méritait...
L'esprit parasité par tous ces évènements, je ne parvenais plus à penser à autre chose. Alors, suivant mon instinct, je décidai de braver les règles de mon père à nouveau, et négligeant les risques, je choisis le plus beau bateau avant de me redresser, prêt à grimper à l'intérieur. L'adrénaline, provoquée par l'excitation d'enfreindre les règles, me redonna le sourire. Vérifiant que personne ne pouvait me voir faire, je me glissai jusqu'au navire, bien conscient que le propriétaire serait prêt à me faire payer le prix fort s'il me voyait m'approprier son bien, sans la moindre autorisation. Mais en cet instant précis, plus rien ne semblait m'atteindre. J'étais insensé et c'était incroyablement bon de n'avoir personne pour contrôler ma vie. J'étais le seul à pouvoir décider de ce que je ferais, là maintenant.

   

BY .TITANIUMWAY